Journées d'études internationales organisées par Janua, association des étudiants du Centre d’Études Supérieures en Civilisation Médiévale de l’Université de Poitiers (CESCM — UMR 6223), et les étudiants de l’Instituto de Estudios Medievales de la Universidad de León (IEM).

• 16 et 17 avril 2008

• Université de León (Espagne)

 

Compte rendu

Le « corpus » n’est rien sans son « âme ». C’est ainsi que C. Treffort annonçait dès l’ouverture du colloque quel serait le carrefour de cette rencontre internationale de jeunes doctorants : l’âme de nos corpus de recherche, c’est-à-dire le discours qui l’informe tout en y puisant ses propres ressources. La mise en relation de nos différentes thématiques augurait des échanges positifs et constructifs pour tous. Dans cette perspective, le colloque s’est déroulé dans une ambiance d’échange et d’expectation de la part de tous ses participants.

Nous avons ainsi été à même d’observer différentes approches de la notion de corpus, différences qui résultent autant de l’éloignement des méthodes que de celui des sujets ou des objets d’étude, confirmant ainsi les mots de C. Treffort : « le corpus de tout chercheur est l’émanation de sa pensée ». Tandis que les uns tentaient d’expliquer les raisons et les structures internes de leur corpus et analysaient ainsi sa construction afin d’en enrichir le questionnement, les autres justifiaient le leur à partir de l’exposition de ses objets. Nonobstant ces écarts méthodologiques nous avons pu cerner les infinies possibilités conceptuelles susceptibles de fonder un corpus d’objets et/ou d’informations.

Nous avons vu avec la communication de S. Biay comment questionner l’unité signifiante d’un corpus en arrière-fond des objets matériels qui le composent. Aux antipodes de cette approche, C. Rebollo Gutiérrez nous a montré qu’il est également possible de concevoir un corpus comme un ensemble homogène d’objets trouvant sa raison d’être dans la matière. Le croisement de différents corpus de sources historiques illustre les potentialités d’un méta-corpus, comme l’a illustré G. Damon à travers les notions de parenté et d’univers lignager. Devant cette idée de pluralité, F. Mondon a maintenu la possibilité d’un corpus bibliographique comme ressource unique. Dans la même ligne, M. Pellón Gómez-Calcerrada nous a présenté la source documentaire comme colonne vertébrale d’un corpus de monuments. La première journée s’est refermée sur la musique : M. Dobby nous a fait comprendre que la problématique du corpus pose des questions d’une infinie complexité à la définition de certains types d’objets : la compréhension d’un corpus constitué a priori doit donner lieu à une réflexion sur le sens de cette constitution.

Nous ne pouvions faire l’économie, comme l’a montré N. Rodríguez Suárez, d’une évocation du corpus dans sa dimension institutionnelle et son développement historique. Nous sommes revenus rapidement dans l’univers des idées, et A. Tastavin nous a dressé un aperçu polyphonique du corpus généalogique. J.A. Moráis Morán a été le seul à envisager la possibilité de travailler à partir d’un corpus disparu, avec les problèmes épistémologiques et méthodologiques que cela implique. L’intentionnalité de la citation (antique) est venue se placer au centre du débat. À partir de problèmes apparemment spécifiques de l’histoire de l’art, il s’est très rapidement ouvert sur l’histoire des textes : dans le monde des lettres encore plus que dans celui des images, la citation n’a de valeur que dans la composition dans laquelle elle s’inscrit, de même que l’objet historique n’a de valeur que dans le corpus auquel le chercheur l’articule, et qui doit révéler sa propre discursivité. Dans cette perspective, R. Del Porto a fermé le colloque de la main de M. Foucault, en montrant comment les outils conceptuels fondateurs de l’épistémologie des sciences humaines peuvent s’appliquer à l’étude d’un corpus monumental.

Le corpus nous est apparu comme une chose à la fois matérielle et mentale, tangible et périssable… Tout corpus est quelque part une trahison des sources et l’invention d’une nouvelle. Comme le disait C. Treffort en ouverture, ne pas réfléchir à cette problématique nous conduit tôt ou tard à un faire un constat d’échec. En revanche, sa mise en jeu est un facteur essentiel d’auto-critique pour le chercheur, et fertilise à bien des égards le champ d’interrogations que sa plume sillonne inlassablement.

 

Direction scientifique

Etelvina Fernández González, professeur d’histoire de l’art médiéval à l’Université de León
Cécile Treffort, professeur d’histoire médiévale à l’Université de Poitiers, directrice adjointe du CESCM

 

Modération des débats

Renée Del Porto, doctorante, présidente de l’association Janua
José Alberto Moráis Morán, boursier de la formation de professeur d’université du ministère espagnol de l’Éducation et de la Science (FPU)

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